Critique de Persée de Lully – Ôlyrix

Persée de Lully au TCE, un Concert très Spirituel

 

La représentation en version concert du rare Persée de Lully au Théâtre des Champs-Elysées a été illuminée par la performance de l’Orchestre et du Chœur du Concert Spirituel d’Hervé Niquet, ainsi que par une distribution de grande qualité.

C’est la version resserrée de Persée en quatre actes et sans prologue, présentée en 1770 pour le mariage du futur Louis XVI et de Marie-Antoinette et ayant inauguré l’Opéra royal de Versailles, qui était proposée hier au Théâtre des Champs-Elysées. Ouvrage rarement donné, il brille par la richesse de son orchestration éclatante, variant les styles et les effets. En ce sens, la performance de l’Orchestre du Concert Spirituel, qui détient là le véritable rôle principal, était attendue et se révèle exceptionnelle. Dirigé par Hervé Niquet, véritable showman tournant autour de son pupitre pour être au plus près de ses musiciens, les haranguant de sa gestique enflammée dans les passages les plus vifs, ou croisant simplement les bras lorsque son ensemble déroule sa partition, l’Orchestre est porté par un premier violon spectaculaire, des trompettes d’une précision chirurgicale et un percussionniste tout en nuances. Le continuo (piano-forte et violoncelle accompagnant les récitatifs), si important dans l’ouvrage, rythme parfaitement l’avancée dramatique de ses interventions. Le Chœur du Concert Spirituel, lui aussi doté d’une partition colorée, est somptueux.

L’écho du public aura cependant laissé remonter un regret général : l’absence de surtitres pendant le spectacle et de livret dans les programmes. Dans un ouvrage rare aux nombreux récitatifs, les spectateurs les moins avertis (et certains parmi les plus connaisseurs également !) étaient rapidement perdus dans l’avancée dramaturgique et ce, quelle que soit la qualité des chanteurs.

La distribution, justement, est composée de onze solistes dont les rôles ont une importance relativement équilibrée. Les yeux rivés sur leurs partitions, ils peinent globalement à faire vivre le texte mais le niveau vocal individuel et collectif est particulièrement relevé. Le rôle-titre est assumé avec beaucoup d’engagement par un Mathias Vidal très juste et sûr. Son morceau de bravoure final est l’une des attractions de la soirée : les vocalises sont parfaitement maîtrisées, avec une belle agilité. Il manque encore au ténor une plus grande souplesse dans le larynx pour colorer son timbre, puis il pourra concrétiser le potentiel que l’on voit déjà en lui. Jean Teitgen, qui nous avait impressionnés voici quelques semaines en Leporello à Rouen (voir notre compte-rendu) fait de nouveau forte impression dans le rôle du Roi d’Ethiopie, Céphée, grâce à sa voix puissante et ample, souple dans les graves et dégageant une réelle majesté.

Chantal Santon-Jeffery, dont le rôle de Vénus comprend l’autre grand air vocalisant de l’opéra, se montre également à la hauteur. Sa prestation, portée par de jolis aigus et des médiums riches et corsés, apporte un vent de fraîcheur à la soirée. Ses interactions avec le chœur et le piccolo sont particulièrement réussies et l’on ne regrettera que quelques vibratos mal maîtrisés. Cyrille Dubois, très convainquant lui aussi en Mercure, confirme rôle après rôle son potentiel : son timbre charmant s’illumine encore dans les aigus et ses interventions bénéficient d’un dynamisme fort plaisant, surtout dans une version concertante. Tassis Christoyannis (le rival de Persée, Phinée) parvient à faire vivre les récitatifs par ses talents de comédien. Sa voix puissante trouve ses limites dans les graves mais emplit l’espace dans les médiums.

Marie Lenormand, Katherine Watson et Hélène Guilmette, plus discrètes, chantent la Reine Cassiope, sa sœur Mérope, et la fille de cette dernière, Andromède. La première offre un phrasé et une diction de très grande qualité tandis que la seconde, revenant au TCE après son excellente Theodora (voir notre compte-rendu), semble moins à l’aise dans ce rôle de méchante. La dernière tire son épingle du jeu grâce à sa voix candide au timbre éclatant, admirablement projetée.

La Gorgone (créature malfaisante capable de pétrifier ceux qui la regardent) Méduse de Marie Kalinine souffre d’une diction très approximative rendant le texte quasiment incompréhensible. Il n’y a dès lors plus qu’à oublier les vers de Philippe Quinault et écouter sa voix de velours chargée d’émotion. A ses côtés, ses deux sœurs Sténone et Euryales interprétées par le baryton Thomas Dolié et le ténor Zachary Wilder, sont vocalement parfaitement complémentaires et font preuve d’une grande vivacité.

 

Damien Dutilleul – Ôlyrix



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